Visite des habitats partagés en Allemagne

habitats partagés Allemagne

Les Audacieux.ses, Do et Stéphane, ont eu la chance de pouvoir partir en Allemagne pour visiter des habitats partagés, dans le cadre de RAPSoDIÂ. Voici leurs ressentis et un avant-gout de la réunion du 24 juin 2022.

Rapsodia, c’est quoi exactement ? 

Stéphane : C’est une recherche action participative, c’est avant tout la rencontre entre des expertises universitaires et des expertises citoyennes. Des femmes, des hommes, de divers horizons qui se questionnent, qui se renseignent, qui observent et qui essaient d’apporter des réponses… sur le sujet : « Penser l’autonomie par l’entraide… »

Do : Autrement dit, c’est aussi de comprendre, de définir le rôle que le collectif des habitant.es peut jouer dans l’avancée en âge de ses habitant.es. C’est d’imaginer la solidarité et l’entraide entre voisins.es qui permet de bien vieillir et de pouvoir rester jusqu’à la fin dans son lieu de vie choisi.

Qu’imaginiez-vous découvrir en partant en Allemagne ? 

Stéphane : L’Allemagne a commencé à travailler le sujet du vieillissement bien avant nous… Depuis le milieu des années 90, on a observé en Allemagne un intérêt croissant des politiques publiques pour ces nouvelles manières d’habiter. Elles s’appuient sur la mobilisation citoyenne avec laquelle elles s’articulent. L’idée était donc de découvrir, de mieux appréhender la culture et la solidarité des Allemand.es envers les seniors.

Nous avions envie de découvrir la diversité des réalisations que produisent les nouvelles formes d’habiter dans les vieillesses issues de la collaboration entre les différents acteurs du champ de l’habiter et du vieillir solidaire. Ceci afin de permettre au plus grand nombre de vivre et vieillir en autodétermination, même lorsque l’on a besoin d’aide et de soins constants, même lorsque l’on souffre de troubles cognitifs.

Do : En France, tu restes chez toi si tu as un logement adapté et que tu as les moyens, sinon c’est la résidence service ou l’EHPAD, qui n’ont rien de participatif…

Nous devons inventer des solutions alternatives qui partent des envies et des besoins des personnes concernées.

Et pour moi qui ait eu le privilège de faire les deux voyages, j’avais envie également de rencontrer d’autres personnes venues des terrains de France pour compléter et approfondir mes réflexions.

Je savais moi aussi que l’Allemagne a commencé à travailler le sujet du vieillissement bien avant la France… Stéphane nous en avait beaucoup parlé suite à son voyage avant le confinement au tout début du projet de la Maison de la Diversité et Anne Labit faisait très souvent référence à des réalisations et des réflexions vraiment poussées sur le sujet dans ce pays. J’avais lu également quelques articles.

Le programme était bien tentant, portant en particulier sur des habitats de femmes, ou à destination plus particulièrement de la communauté LGBTI ou encore conçus pour des personnes en situation de handicap ou souffrant de troubles cognitifs.

Quelles structures avez-vous visité ? et pourquoi ?

La ville de Hambourg est exemplaire de la collaboration entre les politiques publiques et les initiatives citoyennes, dont nous ont parlé les fondateur.trices de STATTBAU et de la KO-Stelle.  Cette ville offre la possibilité de découvrir des formes d’habiter que nous ne connaissons pas, ou peu, en France.

Habiter et vieillir entre femmes comme le promeut et le réalise l’association Arche Nora. Comment s’organise l’entraide et le soin dans un quartier, à partir d’un habitat solidaire de seniors ? C’est ce que nous avons découvert avec LeNa, Voisinage Vivant.

Mais aussi une maison de la diversité, accueillant notamment des personnes vivant avec le VIH, des personnes migrantes et de nombreuses nationalités… tout cela rendu possible par l’action d’un pasteur gay !

Nous avons pu visiter SUN, une colocation pour personnes sans soutien familial, atteintes de maladies neurodégénératives.

Nous sommes également allé.es à Göttingen à la rencontre du premier habitat autogéré de vieilles femmes (1995) plus connu en Allemagne sous le nom : « Les vieilles Dames de Göttingen », où nous avons été accueilli.es dans une magnifique villa Art Nouveau.

Nous devions aller également à Cologne visiter la « Villa Anders », villa autrement, initiative de l’association « Habiter entre gays et lesbiennes » qui existe depuis 2009. Mais cette visite n’a pu malheureusement être maintenue.

Do : A Göttingen j’ai eu l’impression de rencontrer la Maison de mes rêves dans la vraie vie. Stéphane nous parle toujours lors des ateliers de co-construction, et à d’autres moments aussi, du gouffre qui peut exister entre la « lettre au Père Noël » et la réalité. Et là j’ai visité une réalité que je n’aurais pas même osé écrire, à peine imaginer. Un lieu magique : une maison superbe, un jardin magnifique, des femmes accueillantes et généreuses (qui de plus parlaient français ce qui fut un vrai bonheur pour les échanges et les questions) mais surtout un mode de vie, des choix de gouvernance, d’activités et de réflexions (que ce soit sur la fin de vie ou la nécessité pratique et l’absence de honte à utiliser des déambulateurs) qui m’ont enthousiasmée.

Bien sûr ce lieu est une réussite exceptionnelle, et j’en suis bien consciente, mais il montre aussi que c’est possible…

3 ou 4 choses qui vous ont inspiré ou interpellé ? Des idées que vous voulez proposer aux Audacieux.ses pour enrichir le projet de vie sociale et partagée de la Maison de la Diversité ? 

Do : nous avons eu beaucoup de débats entre nous …, la réputation de ponctualité des chemins de fer allemands bien usurpée, nous a permis, entre autres moments, de longs échanges…

L’attachement que je peux avoir et souvent défendre sur la puissance de l’intelligence collective (une théorie mais aussi une pratique que j’ai beaucoup expérimentée) est apparu à plusieurs reprises comme une réalité.

J’ai aussi retenu de nos visites et de nos échanges avec toutes les personnes rencontrées que, si les avantages liés à l’habitat partagé sont nombreux et évidents, les contreparties nécessaires existent également et ne pas vouloir être dépossédé.es de ses choix de vie demande un réel engagement. Il ne faut pas l’oublier. Mais je pense aussi que cela vaut vraiment la peine.

Stéphane : Il ne sert à rien de vouloir tout prévoir, ni même d’imposer … notre projet de vie sociale et partagée doit être un socle, une référence… mais dans la vraie vie, rien ne se passe comme imaginé et la magie ou le pouvoir de l’habitat participatif est que les solutions émergent « naturellement » en fonction du groupe, de ses envies et des sujets traités au fur et à mesure qu’ils se présentent. Mais cela implique un réel choix des habitant.es à travailler ensemble les sujets. Ce qui sous-entend que leur lieu de vie est un vrai choix de vie en collectif où l’on s’engage réellement et non juste une opportunité où il fait bon vivre… Il est fondamental que tou.tes les habitant.es s’impliquent sans exception !

Les choses se font ou se résolvent « naturellement »…

Le modèle de la collocation (8-10 personnes) pour personnes atteintes de maladies neurodégénératives est un modèle qui ne fonctionne qu’avec l’implication forte des familles (ou familles choisies) et des bénévoles ce qui doit nous inspirer pour rester jusqu’au bout dans la Maison de la Diversité.  En France, la Maison des Sages en est l’illustration (cf. article Dr. Alain Smagghe).

De manière générale, je me suis beaucoup sur l’entre-soi, la tension qui peut exister entre le besoin des habitant.es de pouvoir se retrouver entre eux.elles, dans un environnement plus large et inclusif… bref comment répondre à l’attente des personnes et de leurs intimités sans stigmatisation versus un discours plus inclusif et politiquement correct… Une ressource inspirante pour se questionner et réfléchir sur le sujet : https://metropolitiques.eu/Espaces-non-mixtes-l-entre-soi-contre-les-inegalites.html.

D’où la nécessité de se parler, de s’écouter et partager le ressenti et les besoins de chaque personne, sinon on est dans la frustration et le conflit est larvé… d’où l’importance de mettre en place une vraie gouvernance et de traiter les conflits de manière adaptée.

Ah oui et dernier truc pour la maison de la diversité de Hambourg, les parties communes de vie sociale sont payées par le propriétaire et non par l’association qui les exploite… un sujet de négociation avec Croix-Rouge habitat ?

Même si tout ne sera pas transposable en France, apprenons à penser à l’envers (lol). Ce qui est flagrant en Allemagne, c’est l’implication citoyenne, celle des fondations privées, des associations qui soutiennent avec l’aide des acteurs publics et des politiques publiques le vieillissement de la société, qui n’est pas un tabou chez nos voisins !

Assistez au compte rendu des Audacieux.ses participant au groupe d’étude Rapsodiâ ! VENDREDI 24 JUIN 2022 De 14h00 à 17h30 à Paris et en visio
Assistez au compte rendu des Audacieux.ses participant au groupe d’étude Rapsodiâ ! VENDREDI 24 JUIN 2022 De 14h00 à 17h30 à Paris et en visio
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