Vendredi 18 novembre s’est tenue à Bordeaux une table-ronde autour du tabou sociétal de la vie affective et sexuelle des personnes âgées en établissement. Sujet passionnant qui a réuni plusieurs professionnels, des seniors directement concernés et des associations à la chartreuse St André de Caudéran.
Olivier Escots, adjoint au maire de Bordeaux, chargé du handicap et de la lutte contre toutes les discriminations, a ouvert cette table en rappelant les objectifs de la quinzaine de l’égalité et de la diversité, mettant en lumière le Plan de lutte contre les discriminations. De l’importance de construire une société bienveillante et respectueuse dans une ville pour toutes et pour tous, toujours plus fière de ses diversités. Monsieur Escots a ensuite expliqué la volonté briser ce sujet tabou concernant les personnes âgées, tout en abordant la question de la diversité d’orientation sexuelle ou d’identité de genre.
Guillaume Boucher, directeur d’EHPAD à Bordeaux et Sandrine Carême, formatrice diplômée en Santé Sexuelle et Droits Humains, ont souhaité commencer en partageant des situations rencontrées par les équipes professionnelles afin d’illustrer les difficultés, d’en comprendre les raisons. Entre apports théoriques et questionnement éthique, les échanges avec le public ont été nombreux.
La deuxième partie de la table ronde était consacrée plus spécifiquement aux populations des seniors LGBTI+ et des seniors vivant avec le VIH.
Stéphane Sauvé, Fondateur et Délégué Général de l’association «?Les Audacieuses & les Audacieux?», a expliqué pourquoi ces deux populations restent encore invisibles.
« Aujourd’hui, il n’y a rien qui prédispose, en soi, une personne LGBTI+ ou une personne vivant avec le VIH à vieillir moins bien qu’une personne hétérosexuelle cisgenre. Les enjeux sont les mêmes : être en bonne santé, être socialement intégrée, rester autonome le plus longtemps possible, avoir une bonne qualité de vie, prendre du plaisir, avoir des projets …
Ce qui différencie ces deux populations du reste de la population générale, ce sont leurs parcours de vie dans un environnement qui leur a longtemps été hostile et qui continue malheureusement à l’être trop souvent encore aujourd’hui. »
En dépit de l’évolution positive des droits et des mentalités, ces publics ne se sentent aujourd’hui pas suffisamment en confiance et préfèrent se rendre invisibles pour ne pas être jugés ou stigmatisés. Beaucoup ont été stigmatisés, ou discriminés ou simplement témoins de discriminations, et veulent vieillir, comme tous les autres, en sécurité, sans avoir à répondre à des questions inappropriées ou devoir justifier leurs parcours de vie ou être dans l’obligation de refaire un coming out.
Stéphane Sauvé a ensuite présenté quelques spécificités de ces deux populations :
« Le parcours de vie de la personne, son contexte sociétal, ainsi que sa situation sociale influencent directement ses caractéristiques de santé. Les recherches scientifiques menées depuis trente ans en Amérique du Nord, mais aussi plus récemment en Europe montrent cependant qu’il existe cependant des déterminants de santé spécifiques dont il faut tenir compte. »
Ce n’est pas parce qu’une population est invisible qu’elle n’existe pas !
Et il ne faudrait pas penser, puisqu’elle n’existe pas, qu’elle n’a pas de besoins spécifiques… »
Frédérique Harivongs, directrice d’EHPAD à Arcangues, Présidente du Réseau EHPAD Pays Basque, a ensuite rappelé les grands principes et outils mis à disposition par le cadre législatif : déclaration universelle des droits de l’homme ; devise de la République « liberté – égalité – fraternité » ; loi 2 janvier 2002 ; charte de la personne âgée accueillie en établissement ; démarche de bientraitance.
En s’appuyant sur des exemples très concrets, Frédérique Harivongs a témoigné de l’importance fondamentale du « non-jugement » nécessaire à une pratique professionnelle bienveillante et du rôle de l’équipe managériale à animer les équipes dans cette optique. Lors des analyses de pratiques professionnelles, la tension entre « garantir la sécurité et la protection des personnes » et « respecter les droits des résidents » (avoir une vie privée, une sexualité, le droit à l’autonomie, le droit à la liberté sexuelle) doit être questionnée systématiquement au cas par cas.
La table ronde animée par Clara Bourgeois, directrice du Pôle Culture & Santé en Nouvelle Aquitaine, s’est achevée par l’exposition de Pascal Champenoy, artiste peintre autour du vieillissement, de la maladie et du handicap.
Une table ronde qui a permis à notre association de valoriser nos actions et de lier de très bon contact avec la ville, les professionnels du territoire et quelques personnes LGBTI+ désirant monter une antenne Audacieuse à Bordeaux…
Notre association, en partenariat avec Croix-Rouge Compétence propose des formations pour sensibiliser les professionnels à la vie affective et sexuelle des personnes âgées, à comprendre les besoins spécifiques des seniors LGBTI+ et des seniors vivant avec le VIH.
Formation « Approche inclusive de la vie affective et sexuelle de la personne âgée »
Note de position de Juillet 2021 du Cercle Vulnérabilités et Société
« Etre soi jusqu’au bout de la vie en établissement et à domicile »
Les seniors LGBT+, éclaireurs d’une révolution de l’intime
Alors que l’avancée en âge des personnes LGBT+ reste un impensé social, le Cercle Vulnérabilités et Société formule 32 propositions opérationnelles visant à aider les établissements et services à prendre résolument en compte la vie affective, intime et sexuelle en tenant compte du parcours de vie et de la singularité de chacun.